Peter Heubi a commencé la danse à l'age de 10 ans à Berne. A 16 ans il a été engagé dans "My fair Lady" à Stockholm, où il continue sa formation professionnelle chez Lia Schubert. Il reçoit ensuite une bourse au "Rambert Ballet School" de Londres.
Ne recevant pas de permis de travail car trop jeune, il continue sa formation chez Madame Nora, à Paris, où il travaille dans divers spectacles et télévision, notamment avec Serge Lifar, George Skibine et Jacques Chazot. A 19 ans, il est engagé au célèbre "Ballet du Marquis de Cuevas". Très vite il devient soliste, puis premier danseur.
Après la dissolution de la troupe, il est appelé pour danser avec Jeanine Charrat à Genève, puis avec Pierre Lacotte au "Ballet des Jeunesses Musicales de France".
Ensuite le préstigieux "London's Festival Ballet" l'engage plusieurs années comme premier danseur. Pendant une courte période, il danse comme free lance en Angleterre, France et Suisse, puis le "Washington National Ballet" l'invite pour une tournée au États Unis. Saturé du ballet classique, il devient danseur étoile des "Ballet Félix Blaska" qui s'installe à Grenoble et tourne en Europe et en Extrème Orient. Sa carrière de danseur professionnel finit au Grand Théatre de Genève avec Patricia Neary sous la direction artistique de George Balanchine, et avant d'arrêter complètement, il monte le duo "Pit et Phil" avec Philippe Dahlmann.
Très tôt, Peter Heubi s'intéresse à la chorégraphie. Il fait ses premiers ballets dans les workshops à Londres au "London Dance Theater", puis avec un groupe de jeunes chorégraphes issus de l'Opéra de Paris, qui organise des tournées au Club Med pendant les mois d'été.
Au "Ballet Felix Blaska" où il est également maître de ballet, on lui confie la direction des spectacles des jeunes chorégraphes. Pour le "Schweizer Kammerballett" de Jean Deroc, avec lequel il fait une tournée au Japon, il crée un pas de deux. Au "Grand Théatre de Genève" il chorégraphie des ballets pour la compagnie et fonde "L'ensemble chorégraphique de Genève". Les compagnies de Bâle sous la direction de Heinz Spoerli et de Lucerne dirigée par Riccardo Duse l'invitent dans le cadre de spectacles consacrés aux chorégraphes suisses. La Télévision Suisse Romande fait appel à Peter Heubi de nombreuses fois, autant pour de petites commandes que pour de grandes créations. La Télévision Suisse Italienne l'appelle pour la chorégraphie d'une comdia dell'arte. Pour "Pit et Phil" il crée en collaboration avec Philippe Dahlmann quatre heures de programme. L'Opéra de Chambre de Genève fait appel à lui de nombreuses fois pour des festivals d'été dans la cour de l'Hôtel de Ville de Genève.
Actuellement l'activité chorégraphique de Peter Heubi se limite aux spectacles qu'il fait avec les élèves de son école.
Le fait de voir un spectacle du London's Festival Ballet (maintenant English National Ballet) à Zürich, m'avait décidé de devenir danseur. Le danseur étoile John Gilpin qui dansait avec Marilyne Burr était devenu mon grand exemple. Jamais je n'aurais imaginé à ce moment là que j'allais faire plus tard moi-même partie du Festival Ballet et que j'allais danser les mêmes rôles que John Gilpin. Souvent après avoir dansé la première soirée, il disparaissait et je devais prendre sa place. John m'aimait bien, mais pendant les repas un peu arrosés après les spectacles, il me critiquait en disant que j'étais paresseux, que je n'exploitais pas assez mon talent et qu'il ne fallait pas que je croie que toutes les filles étaient folles de moi. John qui était aussi acteur, a écrit un livre très intéressant sur sa vie qui a comme titre " a dance with life ".
Quand à Marilyn Burr, j'étais devenu son partenaire lors de ma tournée avec le Washington National Ballet. Nous partagions le même siège dans l'autobus pendant les longs voyages aux USA. Je lui racontais, qu'un certain jour à Zürich elle m'avait donné un autographe et que j'avais fantasmé sur le stylo qui était encore chaud de sa main.
Il est rare de trouver un bouffon dans ce ballet, mais il s'agissait d'une version chorégraphiée par Orlikovsky et plus tard par Jack Carter.
Mon costume était évidemment fait sur mesure et ma coiffe demandait de nombreux essayages car elle tenait sur ma tête sans élastiques. Ces costumes de John Truscott coûtaient une fortune.
Ghislaine était une de mes partenaires préférés. Je la connais depuis le fameux Ballet du Marquis de Cuevas. Elle lisait toujours de la grande littérature et me conseillait des livres de Lautréamont, Sade, Robbe-Grillet et d’autres. Plus tard je l’ai retrouvé aux Ballet Nationale des Jeunesses Musicales de France qui était dirigé par son mari Pierre Lacotte. Pierre créait des tas de chorégraphies pour cette troupe ou j’étais le premier danseur. Il invitait aussi d’autres chorégraphes et cherchait des décorateurs de talent. Avec un répertoire variant du classique à des oeuvres contemporaines, on tournait dans des conditions très difficiles dans toutes les villes de France et de l’Afrique du Nord. On se levait tôt le matin, voyageait des heures en bus, arrivait à l’hôtel pour poser les valises, allait au théâtre ou on répétait pendant que le régisseur installait les décors et les éclairages, allait manger après le spectacle, retournait à l’hôtel pour dormir et repartait le lendemain pour une autre ville. Notre salaire misérable était rehaussé par les défraiments qui nous permettaient de bien manger, ou alors d’économiser en faisant la cuisine sur nos « bleuets » (petit réchaud à gaz) dans nos chambres d’hôtel. Souvent nous étions découragés de danser sur des scènes impossibles et nous allions nous consoler en mangeant des gâteaux juste avant le spectacle. Dans certains ballets comme « Bifurcations » ou « Penthésilée », Ghislaine et moi avions des scènes d’amour, respectivement de duel que nous nous faisions un plaisir d’interpréter. J’ai aussi des souvenirs étranges d’une série de spectacles ou nous dansions comme artistes invités dans La Belle au Bois Dormant à Cork en Irlande. Plus tard Ghislaine est rentrée à l’Opéra de Paris ou elle est devenu une des grandes danseuses étoile. Elle y travaille actuellement comme professeur.
Ceci est un hommage à Floris, qui est décédé en janvier 2006 suite à un cancer des os. J’ai connu Floris à Paris dans les cours de danse chez Mme Nora Kiss au Studio Wacker.
Il est rentré chez Cuevas en même temps que moi. Très vite il est devenu soliste avec d’autres copains comme James Urbain, Philippe Dahlmann, Karl Waelander, Robert d’Anvers Jean Marie Sosso, George Salavisa etc.
Floris avait une excellente technique. Avec André Prokovsky, George Goviloff, et Nicolas Polajenko, ils faisaient des concours de pirouettes. Dans le studio de répétition du Théâtre des Champs Elysées, ils cassaient une ou deux chaises, posaient le pied sur le dossier arrondi de la chaise et faisaient ainsi un nombre impressionnant de pirouettes. Souvent c’est Prokovsky qui gagnait. Il était un des rares danseurs à faire 15 pirouettes sur scène. Une fois dans la coda d’un pas de deux il faisait des double tours en l’air suivi tout le long de sa coda.
Nous étions une équipe de jeunes danseurs mâles qui faisions les fous et avions beaucoup de succès auprès des danseuses.
Floris était très influencé par le style de Rudolph Noureev, qui avait rejoint le Ballet du Marquis de Cuevas après son célèbre saut dans la liberté à Paris. Avant chaque spectacle Floris faisait, avec quelques autres danseurs au Foyer du Théâtre, une barre avec Noureev.
Après Cuevas, Floris dansait au Ballet de Stuttgart, puis au ballet du XXème Siècle de Maurice Béjart.
Tout au long de sa carrière nos chemins se sont croisés. La dernière fois qu’on a dansé ensemble, c’était au Ballet du Grand Théâtre de Genève sous la direction artistique de George Balanchine et Patricia Neary.
Quelques mois avant sa mort, Floris m’a téléphoné pour me demander de lui procurer des vidéos de nos diverses émissions de télévisions que nous avions fait ensemble. J’ai pu lui obtenir des DVD de ballets qu’il a dansé au Grand Théâtre, que je lui ai apporté dans sa maison à Condon au sud de la France.
J’ai connu Philippe dans la compagnie du Ballet du Marquis de Cuevas. Nous avions 19 ans et faisions partie d’un groupe de jeunes danseurs que Raymundo di Larrin, qui était devenu directeur artistique après la mort du Marquis, poussait pour devenir solistes au sein de la compagnie.
Larrin, qui était devenu marquis à son tour, était le cousin du marquis de Cuevas. Celui-ci l’avait engagé comme décorateur pour la Belle au Bois Dormant.
Après la mort du Marquis, la compagnie changea de nom et devint le « International Ballet of the Marquise de Cuevas ». La marquise, membre la famille Rockefeller, subventionna la troupe encore pendant un an puis le ballet fut dissout. A 20 ans, Philippe a quitté la troupe pour faire son service militaire en Algérie.
Nos chemins se sont recroisés lorsque je faisait partie du ballet du Grand Théâtre de Genève. Philippe, qui était marié à une ex-danseuse habitait dans une splendide ferme à Epalinges. Il m’a contacté plusieurs fois pour danser avec lui au Festival de la Cité ou pour la télévision. Philippe, qui avait gagné le prix René Blum et le prix Nijinsky, était un très bon danseur demi-caractère avec une grande personnalité. Il avait eu un grand succès, notamment dans Cendrillon à Paris. Il cessa de danser assez tôt pour diriger son Ecole de Danse Fusion à Lausanne, d’où sont sortis la plupart des actuels danseurs contemporains du canton de Vaud.
Lorsque j’avais fondé l’Ensemble Chorégraphique de Genève, il faisait partie des 6 danseurs de la petite troupe avec laquelle nous faisions divers spectacles. Puis, quand j’ai ouvert à mon tour mon école de danse à Genève où il donnait aussi des cours qui plaisaient beaucoup aux élèves, nous avons monté le duo Pit et Phil.
Nous avions créé 4 heures de programme. Les spectacles « L’Espace Danse avec Pit et Phil » et « La Dernière Contredanse de Pit et Phil » avaient fait un triomphe dans toute la Suisse et en France. C’était la première fois que deux danseurs qui se ressemblait comme des frères présentaient des numéros qui partait de numéros de cirque à des numéros en travesti; de danse virtuose au danse théâtre; du numéros comiques de clowns (dans ce spectacle les gens se pliait de rire) aux pièces de théâtre parlé (après avoir dansés 90 minutes non stop, nous nous transformions en acteurs, jouant un texte créé spécialement pour nous par Asa Lanova, la femme de Philippe).
Pit et Phil, dont nous étions producteurs, chorégraphes, metteurs en scène, danseurs, décorateurs, scénographes, compositeurs etc. fut la plus belle expérience artistique de toute ma carrière.
Felix Blaska a commencé à chorégraphier dans le cadre des Ballets Roland Petit où il était le partenaire de Zizi Jeanmaire. Le succès de ses premier ballets lui à permis de former sa propre troupe, les Ballets Felix Blaska. J’ai rejoint la compagnie au début (après ma tournée aux USA avec le Washington National Ballet) pour une télévision et puis pour la saison au théâtre de la ville à Paris.
Le succès phénoménal de ses chorégraphies, qui reflétait beaucoup d’humour, de la gaité, une énergie débordante et une musicalité hors norme, le faisait acclamer par la presse comme le chorégraphe le plus doué de sa génération. (C’était la première fois que cette phrase fut inventée par un journaliste. Elle est maintenant devenue banale).
Les Ballets Blaska étaitent la première compagnie de danse française à profiter de la politique culturelle d’André Malraux pour être décentralisé à la Maison de la Culture de Grenoble. Pendant 4 ans j’y étais le danseur étoile et plus tard maître de ballet de troupe. Lorsque Felix a crée un ballet pour le Tokyo Ballet il m’a confié pendant 2 mois la responsabilité de la troupe, en me laissant diriger le groupe de recherche des Ballets Blaska.
Les Ballets Felix Blaska faisaient de grandes tournées en Europe, en Asie et en Extrème Orient. Partout la compagnie avait le même succès et les mêmes critiques enthousiastes.
La compagnie de Felix Blaska a existé pendant environs 10 ans. C’est Felix lui-même qui a souhaité dissoudre la troupe malgré le pont d’or que lui offrait le Ministère de la Culture Francaise. Il est parti aux USA où il a continué de créer pour Pilobolus, Crows Nest Trio, Brodway, le cinéma et le Cirque Flora.
Actuellement des Conservatoires de Danse et des personnalités de la danse comme Charles Jude, danseur étoile de l’Opéra de Paris et directeur du Ballet du Grand Théâtre de Bordaux invitent Felix pour remonter ses ballets et en créer de nouveaux. Ils essayent de réhabiliter sa mémoire et la place qu’il lui faut.
Malheureusement Felix Blaska, un des pioniers de la nouvelle danse en France est oublié par les historiens. Il serait temps de se rappeler l’importance qu’il avait en tant que créateur. Il a donné l’occasion à de nombreux danseurs de s’affirmer et a crée des destins de grands chorégraphes comme Dominique Bagouet et Graeme Murphy.